Protection et cohabitation avec les Chauves-souris

Pipistrelle de Kuhl en Picardie, la sudiste qui arrive dans le nord !

Publié le 7 avril 2025 par Sophie DECLERCQ

La Pipistrelle de Kuhl est une espèce anthropophile et ubiquiste d’affinité méridionale qui a été déterminée pour la première fois en 2008 en Picardie. L’espèce serait en progression vers le nord. Bien que cela soit difficilement identifiable du fait de la ressemblance acoustique avec la Pipistrelle de Nathusius.

En 2015, une première observation d’un individu a été réalisée (trouvé au sol affaibli en ville - AMIENS - en fin d’hiver). L’identification fut réalisée par un chiroptérologue détenteur de la dérogation de capture.

Pipistrelle de Kuhl (c) S.Declercq

Cette donnée est précurseuse et montre déjà à l’époque l’importance de la médiation.

En 2024, ce sont les 3 premiers gîtes avérés dont 2 maternités qui sont découverts grâce à des appels sur la ligne chauves-souris infos (équivalent du SOS chauves-souris) :
- Saleux : Un juvénile de Pipistrelle de Kuhl en émancipation est trouvé par des particuliers sur leur terrasse fin juillet. Une sortie de gîte a confirmé la présence de l’espèce et le gîte a effectivement été localisé sur le pignon d’une habitation surplombant la terrasse. Compte tenu de la période tardive du comptage, seuls 2 individus ont été dénombrés. Le comptage sera reconduit en 2025 afin de connaître l’effectif de cette maternité.
- Laigneville : Une femelle en fin de gestation est trouvée en difficulté par un particulier. L’individu est rapatrié vers un centre de sauvegarde et la requérante poursuit ses investigations en lien avec les médiateurs. A proximité immédiate du lieu de découverte de la femelle en détresse, la requérante a observé plusieurs chauves-souris sortir d’une dépendance. Le comptage n’ayant pu être mené en 2024, il est programmé pour 2025.
- Beauvais : Un mâle de Pipistrelle de Kuhl s’est introduit fin juin dans un laboratoire médical. Un médiateur se rend sur place pour récupérer l’animal et le transférer vers un centre de sauvegarde. La présence d’une maternité n’est pas confirmée bien que le bâtiment présente une configuration compatible avec l’accueil des chauves-souris, néanmoins la présence de l’espèce est ainsi confirmée.

Ces 3 individus ont été identifiés par des personnes formées et habilitées aux mesures des chauves-souris, ce qui a permis de les identifier avec certitude.

En 2022, dans le cadre de mesures de compensation liée à la destruction d’un bâtiment, Picardie Nature cherchait un site équivalent à préserver. C’est grâce au témoignage d’un chiroptérologue chevronné (Sébastien D) que l’association a lancé ses recherches en matinale dans un secteur précis. Il est mis en évidence un nouveau gîte de Pipistrelle de Kuhl/commune dans un local électrique en activité ! En 2024, un suivi du gîte associant comptage en sortie de gîte, couplé à une écoute active et passive simultanées, ont permis de confirmer l’espèce avec un effectif de 12 Pipistrelle de Kuhl pour l’année. Le nombre de données de Pipistrelle de Kuhl étant encore trop faible en Picardie, aucun statut de menace n’a pu être défini régionalement. Néanmoins, elle semble en progression naturelle vers le nord.

Les raisons permettant d’expliquer ces nouvelles données sont encore inconnues. Parmi les différentes hypothèses pouvant expliquer sa meilleure détection on peut envisager : une expansion des populations vers le nord possiblement liée à une sensibilité aux changements climatiques ou bien, une meilleure capacité à dissocier acoustiquement la Pipistrelle de Kuhl des autres espèces ou encore, une plus grande attention portée à l’identification des individus en détresse issus des requêtes de médiation. Il est également possible que plusieurs facteurs en soient la cause. Quoi qu’il en soit, elles sont le fruit de l’implication des différents acteurs et de la mobilisation d’outils performants tel que le cahier technique d’identification des chiroptères qui favorise une meilleure identification des chauves-souris par tous.

Dans ce cadre, les missions liées à la médiation sont primordiales car elles apportent une confirmation de l’espèce jusqu’à la découverte de maternité avec les individus en détresse.

Aurélien BIRO, Morgan BOULAY, Sophie DECLERCQ


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